L’Agence nationale du médicament vétérinaire fête ses 30 ans
L’Agence nationale du médicament vétérinaire (ANMV) a été créée en 1994. Intégrée à l’Anses, elle veille à l’efficacité des médicaments vétérinaires utilisés en France, ainsi qu’à leur sécurité pour la santé des animaux, des humains, et à leur respect de l’environnement. En 30 ans, les missions et l’importance de l’ANMV sur les scènes française et européenne ont sensiblement évolué. Retour sur son histoire et sur les grands défis à venir avec Franck Fourès, directeur de l’ANMV.
Qu’est-ce que l’ANMV ?
Franck Fourès : au sein de l’Anses, l’ANMV regroupe une centaine d’agents. Nos activités se déclinent en trois volets principaux : l’évaluation des médicaments vétérinaires pour autoriser leur mise sur le marché en France ou dans l’Union européenne ; la surveillance du marché des médicaments vétérinaires avec notamment le suivi des effets indésirables pour les animaux traités, les personnes qui sont en contact avec les médicaments ou pour l’environnement; l’autorisation des médicaments vétérinaires et des établissements pharmaceutiques. L’ANMV contribue aussi à l’élaboration de réglementations au niveau européen et à l’harmonisation des processus d’évaluation des médicaments vétérinaires et de leurs résidus dans l’alimentation au niveau international. Nous sommes une petite structure mais aussi l’une des rares en Europe spécialisée dans les médicaments vétérinaires. Les compétences de l’ANMV sont reconnues dans de nombreux domaines, en particulier pour l’évaluation des vaccins. Son appartenance à l’Anses lui apporte une vision large des enjeux de la santé animale, bien au-delà du médicament vétérinaire. Ceci est particulièrement le cas sur le sujet de l’antibiorésistance : nous avons une approche globale de la problématique, en collaboration avec les équipes d’expertise et d’évaluation de l’Anses, notamment celles des laboratoires de recherche et référence de l’Agence. Autre exemple, la contribution des experts de l’Anses a été d’un grand secours pour proposer une méthode d’évaluation des risques adaptée aux médicaments vétérinaires à base de plantes.
Comment l’ANMV a-t-elle évolué depuis sa création ?
FF : En 30 ans, l’ANMV est passée d’un cadre national à un système qui est aujourd’hui presque exclusivement européen. En 2023, nous avons traité environ 30 % des procédures d’évaluation scientifique des médicaments vétérinaires déposées dans l’Union européenne, ce qui représente une part très importante parmi les 27 États membres. Cette place de premier plan dans le système actuel d’autorisation de mise sur le marché des médicaments vétérinaires nous a conduits à revoir notre organisation et à développer nos compétences, au-delà des enjeux scientifiques. En effet, nos équipes doivent être en capacité de peser, par leur expertise et leur position, dans les discussions européennes en matière de régulation des médicaments vétérinaires.
Quels sont les grands défis pour ces prochaines années ?
FF : Plusieurs défis sont devant nous. Comment rester à un haut niveau de compétences dans un contexte où les technologies se complexifient, de même que les exigences budgétaires ? Comment accompagner l’émergence de thérapies qui réclament des cadres normatifs différents de ceux s’appliquant aux vaccins ou aux médicaments chimiques ? Comment disposer d’équipes à la fois spécialisées et suffisamment polyvalentes pour traiter une large gamme de médicaments, allant des génériques à des thérapeutiques innovantes, comme la phagothérapie, les cellules souches ou les vaccins à ARN messager ? Nous devons par ailleurs continuer de concilier rigueur des évaluations, indépendance vis-à-vis des industriels et bonne capacité d’accompagnement des professionnels pour rester un pays de référence. J’évoquerai aussi les progrès à poursuivre dans la lutte contre l’antibiorésistance et le suivi de la disponibilité de certains médicaments vétérinaires et plus spécifiquement des vaccins. D’autres questions émergent, sur lesquelles il faudra se positionner : l’absence de statut de « dispositif médical » en médecine vétérinaire, l’encadrement des tests de diagnostic. L’innovation demeure un défi majeur et le contexte économique joue beaucoup. L’ANMV reste donc attentive aux évolutions du marché et à ses impacts sur l’évaluation et l’autorisation des médicaments. L’utilisation des données de masse, notamment pour le dispositif de pharmacovigilance vétérinaire que nous coordonnons, est aussi un sujet sur lequel nous allons progresser. Autant de perspectives qui continueront à nous mobiliser au quotidien.
Les dates clés de l’ANMV
1975 : création du laboratoire des médicaments vétérinaires à Fougères. Il est chargé d’évaluer les dossiers d’autorisation de mise sur le marché des médicaments vétérinaires pharmaceutiques et de conduire des travaux de recherche sur la qualité, l’efficacité et l’innocuité de ces médicaments.
1988 : intégration du laboratoire des médicaments vétérinaires au Centre national d'études vétérinaires et alimentaires (Cneva). Le Cneva deviendra par la suite l’Afssa puis l’Anses.
1994 : création de l’Agence nationale du médicament vétérinaire suite aux modifications du contexte liées aux crises sanitaires et à la création d’agences dans le secteur des produits de santé à usage humain. L’ANMV prend en charge l’évaluation des médicaments vétérinaires, leur autorisation et leur contrôle. Le laboratoire garde les activités de recherche. Ce laboratoire deviendra par la suite le laboratoire de Fougères de l’Anses.
1995 : Nomination de l’ANMV en tant que centre collaborateur de l’Organisation mondiale de la santé animale (OMSA) en matière de médicament vétérinaire.
2002 : Création du dispositif national de pharmacovigilance vétérinaire coordonné par l’ANMV.
2015 : Mise en place d’un système de déclaration des ruptures d’approvisionnement des médicaments vétérinaires.
2022 : entrée en vigueur de la nouvelle réglementation européenne sur les médicaments vétérinaires. L’ANMV a participé aux travaux pour son élaboration et à la préparation de son application.